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Des platines à l’orchestre : 10 ans de Hip-Hop Symphonique 

Cette année, le Hip-Hop Symphonique a fêté ses dix ans accompagné de SDM, Franglish, Merveille, Favé et le retour du groupe mythique La Fonky Family. Pour ces dix bougies, j’ai rencontré les artistes afin de leur demander quel lien ils entretiennent avec les instruments de musique.

Bastien Stil et l’Orchestre philharmonique de Radio France, © Damien Paillard

Le Hip-Hop Symphonique est un pari réussi : mêler le hip-hop à un orchestre symphonique. Aujourd’hui premier genre musical consommé en France, le rap dialogue ici avec des musiciens du classique dans un projet devenu incontournable.

Dix ans de ponts entre hip-hop et symphonique

Accompagnés par l’Orchestre Philharmonique de Radio France et The Ice Kream, sous la direction artistique d’Issam Krimi et la baguette de Bastien Stil, les artistes ont livré des performances portées par des orchestrations et arrangements inédits signés Issam Krimi et Camille Pépin. Une démarche qui interroge directement l’histoire du rap et son rapport aux instruments.

Car si le hip-hop américain s’est construit au contact de la soul, du jazz et du gospel, des musiques profondément instrumentales, le rap français, lui, a grandi avec les machines. « La culture afro-américaine, c’est le jazz et le gospel, hyper présents. Nous, on l’a pas. On a eu un hip-hop qui est né avec les machines », explique Issam Krimi. Une réalité que confirme Menzo, membre de la Fonky Family : « On a appris le rap avec deux platines, une face B, et vas-y, kick. »

Avec le Hip-Hop Symphonique, Issam Krimi revendique ainsi un retour à une musique incarnée, jouée collectivement : « C’était important pour moi d’avoir une approche de musiciens, d’avoir de vrais êtres humains qui jouent le hip-hop, les grooves, à côté du magnifique orchestre de Radio France. » Un pont assumé entre l’héritage instrumental du hip-hop américain et l’évolution contemporaine du rap français, prêt à dialoguer avec un orchestre symphonique.

Le Rat Luciano (Fonky Family), © Damien Paillard

 « C’est inspirant, ça donne une autre vision de nos morceaux »

Les rappeurs ont l’habitude de la scène et du show, et cette aisance est perceptible. Accompagné de l’Orchestre Philharmonique de Radio France, le live prend une toute autre envergure. « C’est inspirant, ça donne une autre vision de nos morceaux » confie Franglish. Les flows se mêlent aux cordes et aux cuivres, créant une expérience sonore et visuelle unique. Pour certains artistes, cette collaboration constitue une première rencontre avec des musiciens, loin des machines et samples habituels du hip-hop. « C’est la première fois que je fais ça et si c’était à refaire je le referais ! » s’enthousiasme-t-il.

« C’est d’abord une rencontre humaine, mais aussi artistique », souligne Bruno Laforestrie, producteur de l’événement. Cette immersion illustre parfaitement l’évolution du genre, aujourd’hui, les rappeurs n’hésitent plus à s’entourer de musiciens, classiques ou contemporains, pour enrichir leurs créations et offrir des performances scéniques d’une ampleur nouvelle.

Franglish, © Damien Paillard

« Déjà, enregistrer à notre époque, c’était cher alors avoir des instruments… »

Au fil des éditions, le Hip-Hop Symphonique est devenu un véritable espace de découverte pour les artistes. « Certains n’avaient jamais travaillé avec des musiciens. Pour eux, c’est une révélation de voir qu’on peut créer quelque chose de puissant avec une cinquantaine de musiciens », explique Bruno Laforestrie. Une situation qu’il relie à l’histoire du rap français : « Beaucoup d’artistes n’ont pas grandi en travaillant avec des musiciens en studio, simplement parce que ce n’était pas l’usage. »

Menzo, membre de la Fonky Family, se souvient de contraintes très concrètes : « Déjà, enregistrer à notre époque, c’était cher. Alors avoir des instruments, une guitare, une batterie et un band… »

Chez Franglish, le lien aux instruments s’est construit par essais successifs. « J’ai essayé le piano, et j’ai vu que c’était compliqué », confie-t-il. Merveille, de son côté, évoque une envie encore à explorer, elle « aimerait essayer le piano ».

Issam Krimi, © Damien Paillard

L’orchestre n’est plus une exception dans le rap

Aujourd’hui, cette hybridation dépasse largement le cadre du Hip-Hop Symphonique. « Booba, Ninho, Youssoupha, Oxmo,… font venir des orchestres ou des musiciens sur scène. Il y a une dynamique qui fait que les rappeurs ne s’interdisent plus d’inviter des formations symphoniques dans leurs projets », observe Bruno Laforestrie. Une évolution qu’il perçoit comme une étape clé. « Pour nous, c’est une reconnaissance accomplie » reconnaît-il.

En dix ans, le Hip-Hop Symphonique a accompagné cette transformation du paysage musical. « Les rappeurs sont aujourd’hui les numéros un, ceux qui streament le plus, qui remplissent des stades, sont invités dans les plus gros médias », rappelle le producteur. Autant de signaux qui confirment que le rap et les musiciens classiques ne s’opposent plus, mais se rencontrent, se nourrissent et se complètent désormais sur scène comme en studio.

Merveille, © Damien Paillard

Le concert est disponible en vidéo sur Youtube (Mouv’) et en podcast sur les plateformes Radio France.

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